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Richard Millet
Ecrivain et éditeur, Richard Millet est notamment l’auteur de L’Enfer du roman, Tarnac, La Confession négative, Ma vie parmi les ombres, Lauve le pur , La Gloire des Pythre ou Le Sentiment de la langue.
Diffusion : CDE/SODIS.
En librairie le 10 Octobre 2013
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ISBN:
2-36371-0741
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Format:
195 x 125 mm
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Page:
96p.
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Prix:
15.5 €
« C’était le Bœuf, l’inattendue épiphanie de la bête dont nous étions en train de manger une côte, et qui se tenait là, devant nous, au centre de la salle, parmi les convives parcourus d’un frémissement dont il était l’épicentre, ce bœuf en majesté qui tirait de son torse monumental non seulement la nourriture, mais aussi les femmes qu’il nourrissait, divin et adamique, ayant engendré celles en qui il se reproduisait et dont il dévorerait peut-être les fruits, comme Chronos, en tout cas brouillant les circuits du social, du sang et du temps. »
Sous le puissant tabou contemporain de la viande bovine, qu’entame cette parole d’or, jaillit, dans tout son éclat, l’échange de sang primordial entre tous les êtres appelés à naître et à mourir au fil d’un irrésistible renouvellement au cœur de la rencontre, du sacrifice et du mystère de la condition terrestre.
Diffusion CDE/SODIS.
Courrier international
L'Etre boeuf de Richard Millet
Courrier international
L'Etre boeuf de Richard Millet
Le Républicain lorrain
Eros et côtes de boeuf
Le Figaro littéraire
J'envisage de quitter cette France que j'aime
Le Figaro littéraire
La grande nuit humaine
Famille chrétienne
L'homme qui murmurait à l'oreille des vaches
L'Etre boeuf de Richard Millet
Première page.
Eros et côtes de boeuf
Richard Millet aborde souvent des thèmes qui dérangent, jusqu'à inquiéter ceux qui parfois ne l'ont même pas lu. Il est sans conteste l'un des plus grands stylistes de la langue française. Les deux petits opuscules qu'il nous offre cet hiver en font une fois de plus la démonstration. Dans L'Etre-bœuf, il interroge notre rapport à la viande, à la bonne chère, tout en sachant que parler de la viande revient à évoquer le plus intime, c'est-à-dire le rapport au corps et au plaisir. L'auteur souligne que son goût pour la viande bovine, qu'il mange saignante mais jamais crue, lui est venu en même temps que la découverte du corps féminin. Dans l'extraordinaire scène finale, il peint avec finesse comment, lors d'un dîner au restaurant, le partage puis l'échange d'une côte de bceuf fonctionne comme prémisse d'une scène sexuelle. Le texte démontre à travers une véritable jubilation de l'écriture que « partager avec une femme une côte de bceuf, même recuite, est donc un acte éminemment érotique ».
Millet n'en reste pas là, ce serait mal le connaître. Poussant plus loin la métaphore, il va jusqu'à affirmer que cette viande possède une puissance amoureuse, « les femmes rêvant le mâle tout à la fois comme taureau et comme boeuf, dominant et servile, soit l'impossible ».
Dans Trois légendes, Richard Millet, interroge trois figures du plateau de Millevaches et nous entraîne vers mille chemins rêvés, vers le pays de Siom, magnétisant le lecteur par son écriture sublime. Le passage consacré au loup est haletant et d'une rare beauté, dans une forêt profonde, métaphore de la création littéraire. A lire absolument.
Gaston-Paul EFFA
L'Etre-boeuf et Trois légendes, de Richard Millet
(Pierre-Guillaume De Roux, 2013 ).
J'envisage de quitter cette France que j'aime
ENTRETIEN Richard Millet se confie, un an après la controverse dont il fut l'objet.
LE FIGARO. - Vous considérez-vous comme une victime ou comme un incompris9
Richard MILLET - Ce qui s'est passé il y a un peu plus d'un an a totalement bouleversé ma vie A travers cette curée organisée, cette véritable chasse à l'homme, on a visé l'écrivain, et c'est l'un des éditeurs de Gallimard qui a trinqué Certains ont voulu me faire payer ma liberté de parole sur la littérature française et sur certaines têtes d'affiche. Mais ce qui m'a le plus choqué et ébranlé, c'est qu'Eloge littéraire d'Anders Breivik n'ait pas été lu par mes détracteurs, ni même feuilleté, tout comme De l'antiracisme comme terreur littéraire, paru le même jour J'ai été victime de l'opprobre jetée par une poignée d'écrivaillions et de journalistes, condamné au bannissement, et ce, à partir d'une non lecture. Avec l'épilogue que l'on sait : ma démission contrainte et forcée du comité de lecture de Gallimard, maison ou je suis désormais interdit de séjour, malgré le soutien d'Antoine Gallimard. Tout cela faisait désordre. J'y reste simple lecteur et éditeur. Désormais, on m'envoie les manuscrits par coursier.
Comment voyez-vous les choses, aujourd'hui?
J'ai songé et d'ailleurs j'envisage toujours de partir, de m'exiler, de quitter cette France que j'aime mais où presque plus rien n'est possible, ou tout se délite, ou le climat social est devenu délétère Le Liban, où j'ai passé ma jeunesse, est une tentation. J'y réfléchis Pourquoi en 2012, ne m'a-t-on pas donné la parole pour me défendre, m'expliquer, à part le magazine L'Express ? II n'y a eu aucun débat. Qu'en est-il de la défaite de la pensée ? De la décadence de l'Occident ? II est devenu impossible d'évoquer ces grandes questions, tout comme les problèmes liés à l'immigration massive, sans être traité de fasciste. C'est un comble ' On ne sait plus supporter le réel, sa noirceur. ll fallait une mise à mort symbolique. J'étais le coupable idéal Finalement, cette lamentable« affaire » s'est révélée un symptôme, un révélateur de la déliquescence généralisée de notre société.
Suite à cette « affaire », avez-vous eu des regrets ?
Je vis désormais dans une solitude extraordinaire, et je souligne l'épithète. Tout simplement, je voudrais être lu comme Lin écrivain et non être considéré comme un affreux, un pestiféré. Je rappellerai que seuls deux grands réfractaires, Gabriel Matzneff et Renaud Camus, sans oublier Alexis Jenni (Prix Goncourt 2011), que j'ai édité chez Gallimard, m'ont publiquement soutenu.
Depuis votre premier roman, L’Invention du corps de saint Marc, paru chez POL en 1983, pensez-vous être parvenu à la fin d'un cycle ?
J'ai surtout le sentiment qu'une page de ma vie s'est tournée, définitivement. Avec Une artiste du sexe, je pense avoir- tait le tour du roman. C'est un genre très fatigué. Franchement, depuis dix ans, je n'ai rien lu qui m'ait vraiment enthousiasmé ou transporté, même si j'ai beaucoup d'estime pour l'œuvre de Javier Marias ou de l'Estonienne Viivi Luik. Depuis cet été, je fais mon retour vers la poésie. Ça concentre tout ce qui m'intéresse, y compris le spirituel. C'est vital pour moi. J'ai déjà composé une centaine de poèmes, qui probablement seront publiés un jour. La poésie du XXe siècle ne m'a jamais quitté, celle de La Descente de l'Escaut de Franck Venaille, celle endiablée et vertigineuse de Christophe Tarkos, disparu prématurément, celle de Jude Stefan, digne héritier de Catulle et des petits maîtres baroques, sans oublier Pierre Jean Jouve ou le Franco- Roumain Benjamin Fondane, assassiné à Auschwitz. Je pourrais en citer tant d'autres. La liste est longue. Mon regain d'intérêt pour la poésie se manifestait déjà dans mon essai Esthétique de l'aridité, qui prône un cheminement vers les cimes, à travers l'ascèse et la frugalité. A l'opposé de la dictature actuelle de l'hédonisme a tout crin.
Dans cet essai paru chez Fata Morgana, vous affirmiez : «Je participe de la grande misère contemporaine – laquelle est avant tout spirituelle. » C'est toujours vrai ?
Oui, et plus que jamais Et le spectacle de cette grande misère me désespère. Reste le recours au poème ou à l'isolement total •
PROPOS RECUEILLIS PAR THIERRY CLERMONT
La grande nuit humaine
LES FEMMES, la chair, la langue, l'animalité : on retrouve dans ces trois livres publiés simultanément (et qui se font écho) la dilection de Richard Millet pour ses quatre thèmes fondamentaux. Une artiste du sexe, c'est la rencontre de Sébastian et de Rebecca à Paris. Lui est américain, fils d'un vétéran du Vietnam ; elle, plus jeune que lui, est une métisse, fille de Danois et de Maorie de Nouvelle-Zélande. Ces deux enfants de divorces qui paient les lézardes conjugales de leurs parents ont en commun l'exil, leur rapport désespéré au monde, la passion pour l'écriture, la langue française, et la « terreur fascinée de la mort ». Tortueuse et intermittente, leur relation amoureuse est placée sous la bienveillance trompeuse de l'écrivain vieillissant et aigri Bugeaud, originaire du haut Limousin, « vautré dans !a mélancolie » et qui ressemble diablement à Millet lui-même.
On retrouve le couple dans un Paris qui rappelle celui des surréalistes : la place Dauphine, le Pont-Neuf; on pense aux personnages de Nadja ou de Georgette, la protagoniste des Dernières Nuits de Paris de Soupault. Feu follet à « !a joie froide », sphinge sexuelle à la sensualité inquiétante, Rebecca ne cesse de fasciner Sébastian, son «frère en désespoir ».
Enfances brisées
Une nouvelle fois, Millet excelle dans les portraits de femme : « Rebecca était un être de la nuit et, plus qu'à la nuit de Paris, elle semblait appartenir à la grande nuit humaine, celle des enfants brisés et des impossibles amoureuses.» Un peu plus loin, on lit : « Son histoire est celle de son corps, de ses sens, de ses hantises, de l'immédiateté avec laquelle elle se donne ou disparaît.» Le couple n'est pas que de chairs et d'étreintes ; les deux enfants perdus errant dans les intervalles troubles de l'amour échangent réflexions et commentaires enflammés sur la littérature ; l'occasion pour Millet d'évoquer Maurice Blanchot, Flannery O'Connor, Pierre Jean Jouve, Emily Dickinson, Alejandra Pizarnik, et de lancer quElques piques («Les Etats- Unis sont hantés par la collectivisarion et la démocratisation absolue de la littérature »). Avec Une artiste du sexe, Millet signe certainement son meilleur livre, aux côtés de Musique secrète et de La Voir et l'ombre. Par ailleurs, on recommandera la lecture de son éloge impertinent de la viande bovine (L'Être-bœuf)...
THIERRY CLERMONT
L’Etre-bœuf, de Richard Millet (Pierre-Guillaume de Roux, 2013)
Trois légendes, de Richard Millet (Pierre-Guillaume de Roux, 2013)
L'homme qui murmurait à l'oreille des vaches
Après un silence d'un an, Richard Millet revient avec deux livres où les animaux et la nature tiennent une place centrale. Entretien.
Richard Millet est un écrivain discret. Depuis l'incroyable lynchage médiatique dont il a été l'objet il y a un an (son Éloge littéraire d'Anders Breivik k avait fait hurler les bien-pensants, dont trois cents écrivaillons pétitionnaires dans Le Monde), il est resté silencieux, restant chez lui pour écrire. Bien lui en a pris.
Il publie cet automne chez Pierre Guillaume de Roux un bref essai original (qu'on réservera aux adultes), L'Etre-bœuf (voir encadré ci-dessous), où il évoque la condition animale à travers son attirance pour la viande de bœuf, et un recueil de nouvelles, Trois légendes(1).
Pourquoi écrire sur la viande bovine ?
D'abord en raison de la réprobation grandissante autour de la viande; la sensiblerie contemporaine y est hostile. Et plus largement, en raison de mon goût pour cette viande et de quelques scènes que j'avais envie de raconter. J'ai beaucoup gardé les vaches étant petit, dans ma Corrèze natale. Activité qui m'a énormément appris. Quand on garde les vaches, on est seul et c'est éprouvant. Vous êtes obligé de vous forger une force morale, pour parler comme Dostoïevski. Je voulais aussi rendre hommage à la beauté des vaches, dont on ne parle jamais par peur du ridicule. Les limousines, par exemple, avec leur robe froment, et non pas rouille, qui est la couleur de leurs voisines d'Auvergne, les salers. Maîs les plus belles sont à mon avis celles de l'Aubrac, avec leurs grands yeux effilés et comme entourés de khôl...
Notre société entretient des rapports étranges avec les animaux. On les considère soit comme des enfants (« Viens avec Maman!», dit-on à son chien), soit comme des choses qu'on entasse dans des élevages concentrationnaires. Comment voyez-vous ce paradoxe ?
Dans le village où je suis né - cent habitants -, j'ai tué beaucoup d'animaux. Non pas à la chasse, mais pour les manger ou parce qu'ils étaient vieux ou malades, comme font tous les paysans. C'était comme un rite de passage. Les rapports que nous entretenions avec les animaux étaient justes, équilibrés. Les animaux étaient intégrés à la vie de tous les jours. Mais il n'y avait pas ce discours bêtifiant dont vous parlez. On pouvait corriger son chien quand cela s'imposait. En revanche, celui qui était cruel envers les animaux était banni ! Il y avait une hiérarchie entre les animaux et les hommes, que j'aimais beaucoup. Cet ordre est rompu, ne serait-ce que parce que, dans les campagnes, il n'y a plus grand monde. Les rapports sont beaucoup plus lointains. Par ailleurs, est apparue cette idéologie égalitariste, qu'on retrouve dans nos liens avec les animaux. Récemment, un homme ayant pendu son chien a été condamné à cinq mois de prison ferme. Sans justifier son geste, je trouve ça disproportionné. C'est assimiler des animaux à des humains. C'est presque un retour au paganisme. Mais on ne sait plus ce que c'est que l'humain, étant donné l'importance des avancées génétiques, de la procréation artificielle : il est normal de ne pas savoir ce qu'est un animal.
Et puis, il y a cette dureté...
Plus il y a moralisation, moins il y a de l'humain. Le nouvel ordre mondial, qui donne des leçons de morale sur l'immigration et l'antiracisme - j'en sais quelque chose -, est totalement indifférent à la souffrance des immigrés et des indigènes. Même chose pour l'industrialisation de l'élevage des animaux et de leur mise à mort. Moi, je me souviens du départ des veaux qu'on vendait au boucher. Les vaches pleuraient pendant plusieurs jours. C'était déchirant!
Vous publiez aussi Trois légendes...
Ce sont trois récits qui se passent en Corrèze. L'un raconte l'histoire d'un cordonnier, également violoneux, à la fin du XIXe siècle, sans cesse suivi par des loups. C'est tiré d'une histoire vraie. Le deuxième : deux frères partent à la guerre de 39, à qui leur mère a fait jurer de ne jamais s'abandonner l'un l'autre. La troisième histoire est celle d'un ancien marin qui revient s'installer dans sa Corrèze natale et bâtit une sorte de navire dans les arbres. Trois contes assez cruels, où la nature et les animaux sont très présents... Comme un écho à mon essai L'Être-boeuf.
Extrait - Du Christ mort au bœuf écorché
« Concomitante de la sacralisation des droits de l'homme, la question des droits des animaux suppose la destruction de toute hiérarchie, de toute verticalité, à commencer par celle du Christ, figuré en miroir, j'y reviens, dans Le Bœuf de Rembrandt. Ce Bœuf écorché a été peint en 1655, à l'époque des deux Lecons d'anatomie montrent des corps étendus, lesquels rejoignent les Christs morts de Mantegna, de Holbein, de Champaigne Rembrandt était le contemporain de Bossuet, de Spinoza, du jansénisme, de Marc-Antoine Charpentier et des Leçons de ténèbres du Grand Siècle. Il est aussi le contemporain de ceux qui ont peint des bœufs écorchés, en hommage au sien : Chaim Soutine et Francis Bacon, lequel lui adjoint, en 1980, un oiseau de proie, comme pour boucler l'affaire et achever de nous renvoyer à un monde sans Dieu.»
PROPOS RECUEILLIS PAR CHARLES-HENRI D’ANDIGNE
L’Etre-bœuf, de Richard Millet (Pierre-Guillaume de Roux, 2013)
Trois légendes, de Richard Millet (Pierre-Guillaume de Roux, 2013)