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En librairie le 12 Janvier 2012
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ISBN:
2-36371-022-2
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Format:
12.5 x 19.5
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Page:
312p.
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Prix:
20 €
Fou Forêt
Philippe Barthelet
Le français ne s’apprend pas, il se conquiert. C’est un éternel hors-la-loi dont le domaine d’action rejoint un monde plus vaste que l’Hexagone. Fuyant les« autoroutes » du langage automatisé que préconisent les ministères ; ruant dans les brancards du style académique, le français, traqué de toutes parts, riposte et tend ses embuscades… poétiques. Gare à « feu follet » : à l’autre bout du monde, il devient soudain « Fou forêt ». « Coloquintes! Volubilis! hé, clématites ! » ne sont plus de vulgaires injures dans la bouche de Céline, mais tout un jardin extraordinaire aux réminiscences théologiques. Quant aux« âmes chaudes » de Strasbourg, c’est un paradis introuvable que dissimule le délicieux plat de saucisses qu’elles désignent. Promesses bien françaises ? Tant pis si les « péripéties » invoquées par le général de Gaulle au cours de la guerre d’Algérie firent oublier leur sens initial de « catastrophe ». Qu’importe si le célèbre « J’ai la haine » des cités - qui ranime le mot de César - dépasse la sociologie… Le français a du cœur. Ne résista-t-il pas longtemps à la « mort » en lui opposant le « trépas » ? Il est vrai qu’il tient essentiellement son savoir-vivre de la saveur : à mi-chemin entre le savoir et la sagesse.
Une leçon de panache, de poésie et d’humour signée Philippe Barthelet. Diffusion CDE/SODIS.
France Culture
L'Essai et la Revue du Jour de Jacques Munier
Le Figaro littéraire
Précieux langage
L'homme nouveau
Fou Forêt : un jardin de réminiscences
Valeurs actuelles
Fulgurances poétiques
Spectacle du Monde
Philippe Barthelet magicien du verbe
La cause littéraire
Eloge d'un mousquetaire de la langue
Un Livre un jour
Olivier Barrot reçoit Philippe Barthelet sur France 3 le 24 janvier
L'Essai et la Revue du Jour de Jacques Munier
Un mot, d’abord, sur ce titre sibyllin aux consonances joliment feuillues de frondaisons farfelues, emprunté à une enseigne de Kyoto où, paraît-il, la francophonie fait rage. L’auteur explique qu’ayant voulu dire « feu follet », on s’est emmêlé les pinceaux pour donner Fou forêt, et tant pis pour Vaugelas, ses Remarques sur la langue française, utiles à ceux qui veulent bien parler et bien écrire, cet écho déformé depuis les antipodes vient à point nommé illustrer le caractère végétal et surtout d’une fabuleuse plasticité du phénomène qu’on désigne sous le nom de langue, « rien de plus, mais surtout rien de moins qu’un moyen de parler de tout », nous dit l’introït de l’ouvrage, qui à bon droit est donc dédié « Au véritable feu follet », celui qui se manifeste surtout dans les cimetières, l’occasion de rappeler avec le poète que« là où il y a des tombes, il y a des résurrections ».
Non pas que la langue soit seulement cette barque funéraire où nous traînons, comme disait Fritz Mauthner,« d’innombrables cadavres du passé », qui nous imposent leurs manières de voir à travers leurs mots, mais il y a en toute langue un dépôt, dans tous les sens du terme, qui s’offusque du penchant « à s’en prendre aux mots quand on ne peut modifier les choses ». Philippe Barthelet dénonce avec une ironie féroce et jubilatoire les novlangues de tout acabit qui trahissent une impuissance à faire, alors que, comme le rappelle Aragon dès l’ouverture de son Traité du style, « en français, faire signifie chier ». Et le poète de citer L’art poétique de Boileau : « Ne forçons point notre talent, nous ne ferions rien avec grâce ». Si l’éloquence est « l’art de dire quelque chose à quelqu’un », l’art nouveau appelé « politiquement correct » consiste précisément à ne rien dire à personne. Et à imposer sans coup férir au misérable une condition« défavorisée », la « flexibilité » pour des horaires imprévisibles et malcommodes, un « plan de sauvegarde de l’emploi »en lieu et place de licenciements collectifs. Je cite : « La monstruosité du politiquement correct n’est pas tant dans le« correct » que dans le « politique », érigé en diapason auquel tout doit s’accorder ».
L’auteur crédite le général de Gaulle d’une infaillible connaissance de la langue comme moyen de gouvernement, même s’il juge son écriture « si souvent laborieuse ».Celui-ci refusait qu’on appelât les Français venus d’Algérie des« rapatriés », lequel vocable supposait une expatriation préalable pour des gens qui n’avaient jamais connu la France. Célébrant au passage l’apport de ces français d’outre-mer au patrimoine commun de notre langue maternelle, Philippe Barthelet signale l’usage, encore en vigueur dans nos banlieues, de « l’accusatif absolu » : là où on ne hait pas quelqu’un ou quelque chose mais où l’on « a la haine, comme on a le feu sacré ». Pas besoin de préposition ni de complément, « on a quitté la sociologie pour la métaphysique ».
Dans le registre politique, dont on sait depuis Talleyrand qu’il est le plus souvent « l’art d’agiter le peuple avant de s’en servir », le général qui avait fait carrière à la radio avant de se servir de la télé comme d’un instrument de pouvoir (« Avec elle, l’orateur suprême débarquait dans la salle à manger »,soixante fois en onze années de présidence), le premier magistrat embarqué avait su trouver le ton et le style, n’hésitant jamais à « donner des rallonges à Littré », comme dans l’expression visant le « quarteron de généraux », qui pis est « en retraite », pour désigner ce qu’il appela un « pronunciamiento », en évitant soigneusement les termes de rébellion ou de putsch qui auraient donné un commencement d’existence, voire de succès au soulèvement. Le mot, difficile à prononcer pour une bouche française était déjà une façon de désamorcer le conflit, et que dire du quarteron, qui signifie en fait « petit quart », ce dont les généraux en fin de carrière ne devaient pas se relever. Je cite encore : « De Gaulle, qui ne se reconnaissait d’autre « rival international » que Tintin, ramenait l’affaire d’Algérie à une péripétie d’opérette pour république bananière ».
Pour conclure, je vous propose la chronique virtuelle, qui nous rappelle que la cybernétique était pour les Grecs l’art de mener les hommes en bateau, « une technique de pilotage qui peut devenir une méthode de gouvernement », d’ailleurs gouverner vient de gouvernail qui vient lui-même de cybernétique, un mot qui a du être inventé par Ulysse, « le prince des expédients et des échappatoires, nous dit Philippe Barthelet, qui constate que la route d’Ulysse est devenue autoroute, autoroute de l’information qui mène à tout et à rien,« en tout cas rien de saisissable », là est précisément le progrès : « la cybernétique nous désencombre de la réalité ».C’est le règne du virtuel, dont la montée en puissance doit sans doute beaucoup au sens anglais de virtuel, virtual qui est un faux ami, au sens où, contrairement au français, où le mot signifie « qui est seulement en puissance et sans effet actuel, virtual veut dire : « de fait ».Je cite : « La Bourse l’a si bien compris qu’elle appelle« sous-jacents » ce qu’on nommait autrefois marchandises, avec lesquelles elle joue ou plutôt ne joue plus, car jongler virtuellement avec leur pur signe algébrique permet d’acheter et de revendre des récoltes de blé ou de coton qui n’ont pas encore été semées avant qu’elles soient transportées sur des bateaux qui n’ont pas encore été construits. Comme on le voit, la virtualité économise la réalité. C’est donc l’avenir, un avenir, et c’est bien là tout le progrès, qui n’a même plus besoin de présent ».
JACQUES MUNIER
* Philippe Barthelet a longtemps été chroniqueur sur France Culture dans l’émission d’Antoine PerraultTire ta langue, ces textes sont issus de ses chroniques.
Fou Forêt,de Philippe Barthelet (Pierre-Guillaume de Roux, 2012)
Réécoutez la chronique de Jacques Munier.
Précieux langage
Considérations buissonnières sur le français et les Lettres
Dans la foulée de L'Étrangleur de perroquets, de Baraliptons (en 2007), puis de L'Olifant, Philippe Barthelet, qui ne fait rien comme les autres, poursuit cahin-caha son « Roman de la langue». Familier de Joseph de Maistre, de Dominique de Roux, exégète d'Ernst Jünger, il nous livre aujourd'hui de nouvelles considérations buissonnières, tout en mordant les nouveaux « miliciens de la langue ». Dieu merci, Barthelet n'est pas seul. Richard Millet, Andreï Makine, François Taillandier, Benoît Duteurtre, Jean Clair et le regretté Jean Dutourd, parmi d'autres, sont bien là, à ses côtés. il met les pieds dans le plat (et on l'accompagne) du « politiquement correct », fondé sur cette « hypocrisie imparable : le respect des minorités», d'où une «langue entortillée de niais euphémismes, de plates périphrases et d'ineptes circonlocutions». En un mot : châtrée. Un peu plus loin : « "La correction politique" est faite aussi pour les chiens. » On approuve.
« L'espérance est une lacune de la fatalité »
De même pour ses attaques, toujours empreintes d'une certaine élégance, contre les gargarismes de la francophonie officielle (« La francophonie est bonne pour les goujats.») Au besoin, il appelle à la rescousse les anciens qu'il admire, comme Boileau, ou, plus près de nous, le grand Suisse Charles-Albert Cingria, qui déclarait que la langue doit être «fine, donc alexandrine, itinérante, aimable, scientifique, sensible, pleine de ménagements de la raison et du coeur... ». Mais Barthelet n'est pas que force ni que rage. Sa qualité est d'aimer d'amour et de défendre le français, à l'heure où la langue et la littérature sont menacées par « la fatalité du commerce, toujours entre négoce et négociation ». Il rend hommage aux poètes emprisonnés (Apollinaire, Théophile de Viau...), au vin des poètes chanté par Raoul Ponchon, Rûmi, Rabelais, et nous parle de méthyologie, science mise au point par Lichtenberg, qui explique ce que l'homme peut dire ou écrire sous éthylisme.
En revanche, on a bien du mal à le suivre quand il évoque la « grâce d'un chant inimitable » des Poèmes de Fresnes de Robert Brasillach, avant, justement, le coup de grâce, épuratif, millésime 1945. Comme quoi les muses ne sont pas toujours fertiles. Y compris pour Eluard, qui avait loué le « cerveau d'amour » du camarade Staline, en 1950. On préférera Barthelet quand il réhabilite les Précieuses (qu'on écrivait Prétieuses au Grand Siècle) et leur gosier. Sans doute ce qui le pousse à aphoriser, ici ou là. Comme cette sentence que l'on retiendra, sans peine : «L'espérance est une lacune de la fatalité. »
THIERRY CLERMONT
Fou Forêt, de Philippe Barthelet (Pierre-Guillaume de Roux, 2012)
Fou Forêt : un jardin de réminiscences
On aurait tort de se laisser abuser par le format du dernier opus de Philippe Barthelet. On croira à un simple livre de poche et on emportera avec soi un véritable feu d'artifice d'intelligence, de culture (au meilleur sens du terme) et même de savoir vivre. Parce que l'auteur tient une chronique appréciée et suivie sur la langue française, on risque de conclure un peu vite qu'il s'agit là d'un recueil dont la mission serait de nous faire redécouvrir notre langue. L'ambition ne serait pas vaine, tant il y a des progrès à faire dans ce domaine-là. Malgré tout, il faut bien convenir que, sous l'apparence de cette illustration de la langue française, Philippe Barthelet nous entraîne plus loin, et parfois même plus haut, que cette nécessaire mission. Ou, plus exactement, il dévoile à nos yeux de modernes engoncés dans des habitudes de robot combien les mots transportent avec eux tout un univers à conquérir, toute une forêt à explorer et même « un jardin extraordinaire aux réminiscences théologiques. »
Les prétextes sont variés, allant de la dénonciation des effets du politiquement correct dans le monde des expressions à l'évocation d'une scène historique ou des tics du langage dans notre contemporaine condition. C'est le propre de la chronique de faire feu de tout bois et même parfois de créer le motif de se laisser aller a ses petites marottes. Pour nous autres gens pressés, elle y ajoute le précieux avantage d'être concise, et ici bien enlevée, nous laissant piocher au gré de nos attirances ou de notre imagination. Mais insistons : Barthelet nous pousse à réfléchir et nous invite au bon sens. À le lire, on se dit qu'il sait tout, aussi bien les vues de ces Messieurs de Port-Royal que les prêches de saint Vincent Ferrier. A certains endroits, il agacera certainement. Mais c'est parce que, comme Bernanos évoquant Drumont, il nous donne un livre vivant. Nous n'en avons plus l'habitude et c'est dommage. Raison de plus pour le lire très vite.
PHILIPPE MAXENCE
Fou Forêt, de Philippe Barthelet (Pierre-Guillaume de Roux, 2012)
Fulgurances poétiques
C'est à la manière dont sonne une langue qu'on reconnaît si elle ment ou vit de sa vraie vie. La fulgurance poétique reste encore le meilleur gage de sa vigueur. Que Feu follet devienne ainsi Fou forêt à Kyoto, dépasse, en somme, toute espérance, extrapolation mise à part. Puisque, dit Philippe Barthelet, chroniqueur à Valeurs actuelles, « là où il y a des tombes [et donc des feux follets], il y a des résurrections ». Celle du français, prisonnier du double carcan de la "correction politique" et de l'anglicisation galopante, ne tient plus qu'à cette flamme faite d'éclat et de résistance... Comment échapper pourtant au spectre de la servilité et de l'effacement, qui, vu du ciel, plane non pas sur le réseau mais bien sur la résonance fantomatique de nos communications : « C'est ainsi que les aéroports ont maintenant des "lignes domestiques" et non plus intérieures ; que les divers guichets ne donnent plus de renseignements, mais des "informations"; et qu'on n'occupe plus un lieu, mais un "site". » Qui donc habite encore le pays introuvable du français, aujourd'hui réduit à peau de chagrin sous l'hégémonie de la mondialisation ? Blois et Vendôme murmurent encore le « souventes fois » de madame de Sévigné. De même que Marseille fait volontiers claquer le mot absolu de César : « J'ai la haine. » Ou que le Calvados, fidèle à Vaugelas, aime à se « donner de garde ». Tandis que la Franche-Comté des aïeux mal assurés sur leurs jambes « tratelle » parfois- parlant à son insu comme le duc de Saint-Simon. Mais c'est à Strasbourg que les "âmes chaudes" désigneront bien plus qu'un délicieux plat de saucisses mais le lieu même de la "saveur", ce concentré de francité qui fabrique à une manière de sentir et de penser unique au monde, sa devise profonde : "Entre savoir et sagesse". Philippe Barthelet, magnifique conteur et styliste auquel on doit déjà Baraliptons (prix de l'Essai de l'Académie française 2007), nous conduit au coeur du plaisir de la langue
ANNE-SOPHIE YOO
Fou Forêt, de Philippe Barthelet (Pierre-Guillaume de Roux, 2012)
Philippe Barthelet magicien du verbe
LEXICOGRAPHE, GRAMMAIRIEN, FUNAMBULE DE la langue, Philippe Barthelet est un peu tout cela Les lecteurs du Spectacle du Monde et deValeurs actuelles le connaissent par les billets qu'il y signe à chaque numéro, « Le mot du mois » et « L'esprit des mots » Mais pareil à un magicien, il cache dans son chapeau bien d'autres talents. La grammaire ne conduit-elle pas à tout - à la condition d'en sortir? On s'en assurera en lisant Fou Forêt, son dernier livre, qui retrace l'épopée du français à travers les âges et les usages.
Depuis l'Etrangleur de perroquets, publié en 1991, il s'est lancé dans un vaste chantier la poursuite du « roman de la langue » II y eut Baraliptons, en 2007, couronné du Grand Prix de l'essai de l'Académie française, et l'Olifant, en 2008. Voici aujourd'hui Fou Forêt, objet d'ufologie littéraire, dont on ne sait s'il faut le faire précéder du féminin ou du masculin –feu follet folâtrant dans la forêt touffue du langage Comme il se doit, le personnage principal de ce « roman de la langue » n'est autre que le français Philippe Barthelet en fait une sorte de héros résolument antimoderne, en butte aux Trissotin du savoir, tout autant malmené par les barbons que par les barbares qui se pressent à nos portes, menacé dans son être par les progrès du « globish » et de l'espéranto des affaires
Ainsi dresse-t-il, face à ce mur de l'ignorance, un monument, le monument aux mots, ces mots tombés au champ d'honneur des grandes batailles sémantiques.Tout au long de ces pages, il nous rappelle combien la grammaire a à voir avec la géopolitique, cette « grammaire des civilisations » chère à Fernand Braudel Car il n'y a pas de géopolitique sans poésie. De Gaulle, Malraux, Dominique de Roux, trois noms auxquels celui de Barthelet est associé, ne l'ignoraient pas. S'il est vrai que le poète est celui qui habite la langue, alors il en est un, et des plus déroutants. Sa patrie est le français, dont il est le serviteur à la fois cocasse et fidèle A l'écriture automatique, au français fonctionnel, à la novlangue technocratique, aux réformes soviétiformes de l'orthographe, il oppose le génie du français et sa rationalité contrariée, pourvue d'innombrables exceptions grammaticales qui confirment et confortent la règle Aux petits pions de la rue de Grenelle, siège de l'Education nationale, il préfère l'école buissonnière du langage et les étymologies bariolées.
Tout l'éloigne des semiologues et des pédants, et du premier d'entre eux, Roland Barthes. « L'étymologie est [. .] catégorique, écrit-il facétieusement: Barthelet n'est pas, à aucun égard, un diminutif de Barthes. » A l'un, la chaire du Collège de France ; à l'autre, la chair de la France. Imaginez Alexandre Vialatte réécrivant le Discours sur l'universalité de la langue française, de Rivarol, vous obtenez Barthelet. Ajoutez à cela l'érudition d'un Etiemble, auteur de Parlez-vous franglais/ Beaucoup de science, autant de fantaisie. Fou Forêt est un bric-à-brac enchanté qui tient comme un numéro d'équilibriste, on ne sait trop comment. C'est écritdans une langue dont on ne voit guère d'équivalent aujourd'hui, pleine de finesse et de légèreté, une légèreté qui ne s'interdit aucune profondeur. Les adjectifs se disputent sous la plume pour en fixer les contours : est-ce délicieux, exquis, inimitablement civilisé, merveilleux, féerique, précieux, mais sans le moindre ridicule ? Tout cela, assurément. Avec tous ces dons, on pardonnera à l'auteur de se laisser parfois aller à pétrarquiser - son péché mignon.
CHEZ LUI, l'écrivain n'est pas seulement souverainiste, il est souverain. Sa langue maternelle descend tout droit de l'ordonnance de Villers-Cotterêts, en 1539, par laquelle François Ier institua le français, ce patois roman qui détrôna alors le latin dans les actes officiels. Peut-être même procède-t-elle des serments de Strasbourg qui scellèrent, au milieu du IXe siècle, dans un très vague protofrançais, l'alliance de Charles le Chauve et de Louis le Germanique contre Lothaire Ier". Autant dire que l'auteur de Fou Forêt est aussi ancien que notre pays, même si ses livres sont plus nouveaux que le journal du matin, commele disait Péguy d'Homère. Le plus curieux chez ce poète de religion gaulliste, c'est qu'il y a dans tout ce qu'il écrit un désordre préclassique, bien plus proche, au fond, des Gaules que de Charles de Gaulle. C'est celui d'une France encore féodale, d'oc et d'oïl, stylistiquement moins timorée, plus audacieuse, autrement bigarrée que la nôtre, où les mots ne se coulaient pas si aisément dans leur moule académique.
Pierre Gripari, autre collaborateur du Spectacle du Monde, disait, en manière d'amusement, que le français est la langue originaire, dont tous les idiomes découlent, le tronc commun, au sens darwinien de l'expression. Philippe Barthelet n'est pas loin de penser la même chose. Avec Pou Forêt, il nous livre un chant d'amour à la France et à son coeur nucléaire — la langue, celle de Molière, de Paul-Jean Toulet et de Charles-Albert Cingria, à qui vont ses préférences. C'est le français des Francs, étymologiquement : les hommes libres. Homme libre, toujours tu chériras ta mère, la France.
FRANCOIS BOUSQUET
Fou Forêt, de Philippe Barthelet (Pierre-Guillaume de Roux, 2012)
Eloge d'un mousquetaire de la langue
Depuis déjà longtemps, l’écrivain Philippe Barthelet, avec un esprit bien français et un style digne du Grand Prix de l’essai que l’Académie française lui décerna en 2007, tient une chronique de défense de la langue française dans l’hebdomadaire Valeurs Actuelles. Chaque semaine, il réussit à tenir en haleine ses fidèles lecteurs avec la pudeur de l’écureuil, le savoir-faire du grand professionnel et la grâce de l’artiste.
Du panache, Barthelet n’en manque assurément pas. Non seulement il se fait militant infatigable de la langue française non sans audace ni courage, mais encore il se refuse toujours à mettre « la littérature à rude épreuve » et n’hésite pas à se moquer du « langage automatisé que préconisent les ministères », surtout en cette période d’élections présidentielles où les plus prestigieux de nos candidats à l’Elysée ruent volontiers dans les brancards du style académique…
Nous aimons l’ironie de Philippe Barthelet et son sens inné de la poésie. Pour un magazine comme Valeurs Actuelles, bénéficier de la collaboration fidèle d’un tel essayiste est une permanente aubaine ! Pour cet expert, « le français ne s’apprend pas, il se conquiert » et « le langage est la signature de l’être ».
À la devanture de nos libraires frigorifiés, en ce mois de février, un petit livre vient d’apparaître et intrigue. Sous le titre de FOU FORËT, il est justement signé Philippe Barthelet et nous entraîne dans l’épopée de la langue avec une force de conviction remarquable. C’est un tout jeune et talentueux éditeur, expert en insolite (1) qui a pris le risque de le publier et de le diffuser prenant ce pari contre la médiocrité et la mollesse ambiante. En fait, on lit son ouvrage « savant » sans jamais s’ennuyer. Toutes les deux ou trois pages, on en apprend de belles ! Ainsi, on découvre que le langage « qui est un grand maître parle de silence de mort » (p145). Et l’on approfondit la réflexion philosophique en poursuivant : « De fait, la mort est un autre nom du silence ; elle est moins le contraire de la parole que celui du bavardage, c’est-à-dire de la parole vaine ».
Au bout extrême des mots, Philippe Barthelet est un sage. Il fait partie des empêcheurs de tourner en rond. Il est davantage poète que professeur ou puriste. Il aime à nous montrer le ridicule de certaines expressions de notre bel aujourd’hui… En attirant les rieurs à lui, il réussit aussi à nous faire explorer ce « jardin extraordinaire » qu’est une langue natale, à nous convaincre que « le français a du coeur » !
Dans les écoles, on devrait faire entrer dans les programmes d’explication française des pages bien choisies de Philippe Barthelet. Le candidat à la présidence de la République qui osera préconiser cette idée, croyez-moi, y gagnera de nombreux électeurs et électrices ! Surtout venus du royaume des poètes…
JEAN-LUC MAXENCE
http://www.lacauselitteraire.fr/chronique-du-sel-et-du-soufre-fevrier-2012.html
Fou Forêt, de Philippe Barthelet (Pierre-Guillaume de Roux, 2012)
Olivier Barrot reçoit Philippe Barthelet sur France 3 le 24 janvier
Philippe Barthelet s'entretient avec Olivier Barrot dans l'émission "Un Livre un jour" sur France 3 du mardi 24 janvier à 17h05 à propos de Fou forêt, chroniques délicieuses sur la langue.
L'émission est diffusée sur le site de l'émission : http://programmes.france3.fr/un-livre-un-jour/index-fr.php?page=accueil&id_article=2756
A écouter absolument !
Fou Forêt, le roman de la langue, de Philippe Barthelet
(Pierre-Guillaume de Roux, 2012)